[Argad] Ça s'en va et ça revient... (guerre de la Ligue)

Et voici donc le récit de cette aventure, samedi dernier à la Maison de quartier Francisco Ferrer à Rennes.

Nous sommes à la fin du seizième siècle dans le sud-ouest de la Bretagne, quelque part près de la côte. Les partisans du nouveau roi de France, Henri IV, alliés au Anglais, s'opposent aux partisans de la Sainte Ligue (ultra-catholique) alliés aux Espagnols (le conflit entre Espagnols et Anglais est alors farouche, c'est peu après l'Invincible Armada).

Un petit scénario assez simple ...avec quelques fioritures (j'y reviendrai). Ça a fonctionné avec un MJ (maître de jeu, en partie joueur quand même) et un seul joueur. On aurait pu prendre davantage de joueurs ou de joueuses en inversant des rôles. L'idée était une situation déséquilibrée dès le début puis inversée, offensive puis contre-offensive (une "histoire d'un aller et retour" comme dirait l'autre).

En début de partie une troupe de Ligueurs se positionne secrètement dans plusieurs endroits du terrain pour contrer l'arrivée de Royaux et d'Anglais plus nombreux. On sait donc d'avance qu'ils devront reculer en tentant de le faire le mieux possible (avec les règles optionnelles d'embuscade) jusqu'à l'arrivée de renforts espagnols qui renverseront la situation pour repartir dans l'autre sens (sauf gros imprévus ou poisse d'un côté ou de l'autre).

Pour pimenter la chose et avec un seul joueur, le MJ ou arbitre (moi-même) qui manie les assaillants ne connaît pas les lieux d'embuscade prévus et écrits secrètement par ce joueur, d’où des surprises pour le MJ lui-même ! Et en l'occurence le joueur était Ehouarn avec son personnage de ligueur "Antonin Le Hir de Lostbras" déjà rencontré dans une précédente aventure ici :
https://www.anargader.net/t2524-argad-bondieuseries-au-pied-du-dolmen

Le terrain, avec à droite un gros village près d'une digue à marée. Quelques maisonnettes plus pauvres sont sur la gauche, près de la route.



Un groupe d'Anglais arrive près de ces huttes, ce qui inquiète les paysans.



Plus loin au nord, un petit parti de Royaux (partisans du nouveau roi de France Henri IV).



Première embuscade de la journée : deux arquebusiers ligueurs apparaissent soudain sur le promontoire au-dessus de la route (où personne ne les attendait) et tirent sur les deux cavaliers anglais qui avançaient en tête.



Un résultat... sans bavure.



Plusieurs tireurs anglais (quatre arquebusiers et un archer) avancent aussitôt pendant que les arquebusiers rechargent. Au prochain échange de tirs ils les abattent tous deux, malgré la protection des buissons, en perdant un des leurs.



Puis, au fur et à mesure de l'avance des Anglais et des Royaux, d'autres Ligueurs cachés ici et là apparaissent.





D'autres encore, dans un chemin creux avec un tout petit canon. Les Anglais montent néanmoins à l'assaut, et les Royaux approchent de l'autre côté, ce qui pousse les Ligueurs à reculer rapidement.

Au galop de son cheval, Antonin fait un rapide aller-retour jusqu'au village pour juger l'opinion des habitants, les incite à résister aux huguenots, et prend des informations auprès d'un marchand ...qui n'a pas grand'chose à lui dire à ce moment-là. Il rencontre un petit groupe d'individus à l'air louche, apparemment des brigands ; leur très jeune chef est le déjà célèbre Fontanella (La Fontenelle) aventurier rallié à la Ligue pour faire des mauvais coups, qui accepte d'envoyer un de ses hommes armé d'une arquebuse pour défendre l'entrée du village, mais semble surtout préoccupé de rassembler on ne sait quel butin et d'emmener un prisonnier qu'il gardait dans une maison.

Peu de temps après, alors qu'Antonin rejoint sa troupe qui continue à se replier, quatre catholiques fanatiques (à gauche) arrivent par une autre route, en criant et brandissant une grande croix et une bannière de la Ligue (ce qui un peu plus tôt aurait pu faire foirer les embuscades). Ils semblent peu contrôlables, alors Antonin les incite à passer devant.







Antonin remarque une femme vêtue de rouge, armée d'une arquebuse, arrivée avec ces excités mais qui se faufile seule derrière sa troupe. Il se souvient l'avoir déjà rencontrée, elle est aussi du parti de la Ligue mais impliquée dans des affaires mystérieuses. Sautant par-dessus un talus, elle part soudain à travers champs en direction de la digue....





...ayant peut-être aperçu de loin La Fontenelle qui, avec trois de ses hommes, une charrette, et un prisonnier, tente de s'éloigner du village avant l'arrivée des Anglais.





À l'autre entrée du village, plusieurs Anglais qui avancent se font soudain tirer dessus par un arquebusier caché dans une maison.



Trois d'entre eux se mettent à défoncer la porte de la maison, ce qui prend "un certain temps". L'archer anglais resté à surveiller la rue, ne voyant pas d'autre ennemi, s'amuse à tirer sur la statue du saint qui veille sur le village (car en bon protestant il considère les images saintes comme idolâtres).

Et voilà que soudain... une petite avant-garde espagnole apparaît à l'autre bout de la digue. La Fontenelle, bien qu'en principe du même bord (puisque partisan de la Sainte Ligue) ne semble pas souhaiter les rencontrer et rebrousse chemin pour remonter le long du vallon (on le voit au second plan avec ses suivants) en abandonnant la charrette que les Espagnols contournent avant d'arriver à l'entrée du village.





La femme en rouge a rejoint La Fontenelle qui, avec trois brigands chargés de coffres et son prisonnier, tente visiblement de quitter les lieux par les passages les moins fréquentés.





Intrigué et poussé par son habituel instinct... et rassuré pour la suite de la bataille par l'approche des Espagnols, Antonin se précipite avec une petite escouade pour poser quelques questions à ces fuyards.

Sans tenir compte des protestations de la Fontenelle, et étant supérieur en nombre et en armement, il n'hésite pas à se faire menaçant. La Fontenelle lui explique qu'ils sont du même parti et qu'il s'en va avec ses propres biens et un prisonnier. Antonin décide alors de voler les voleurs, il exige qu'on lui remette le prisonnier et les petits coffres de butin, et tant qu'il y est il réquisitionne aussi les trois brigands qui les portent. Il consent à laisser partir La Fontenelle seul, avec épée et cheval pour qu'il continue à servir la Ligue... La Fontenelle s'en va en maugréant.

Antonin décide aussi de retenir la mystérieuse femme vêtue de rouge, qui dit se nommer Katell Ruz (sans doute un pseudonyme). Il se doute qu'elle est de son camp, mais par précaution il lui confisque quand même son arquebuse, ce qui lui vaut de recevoir une gifle (test par un jet de dé à smiley). Puis il demande au prisonnier qui il est, celui-ci répond (avec l'accent du MJ) "my name is Robert Davidson, I'm a master gunner, je souis maître canonnier..." (donc un Anglais, et spécialiste qualifié ; La Fontenelle pensait en demander rançon et craignait que les Espagnols le lui tuent).



Les Anglais les plus proches de cette scène n'entendent pas ces conversations mais voient les mouvements de loin et semblent se demander ce qui se passe.



Loin de là, près des pauvres huttes, quelques paysans profitent du désordre pour s'emparer des bagages de la mule que les Anglais avaient laissée attachée là.



Voyant le vent tourner, les Royaux décident de rebrousser chemin, sans être poursuivis.



Les Anglais décident donc de partir aussi. Deux cavaliers espagnols tentent une charge sur les tireurs anglais éloignés des autres...



...Un des cavaliers est victime des tirs avant le contact, l'autre piétine un des arquebusiers. Les survivants se désengagent, les derniers Anglais se retirent sans hâte, mollement suivis par l'avant-garde espagnole.





Antonin se prépare à retourner au village. En comptant les fanatiques survivants, et les trois brigands qu'il a quasiment enrôlés de force, il se retrouve avec un peu plus de monde qu'en arrivant !



Ne négligeant pas ses intérêts, il envoie un émissaire proposer aux Anglais de racheter leur maître canonnier ; ce qui, après une brève négociations, se conclut pour 200 livres. Les petits coffres des brigands contiennent des bijoux, objets, et pièces, sans doute volés dans des manoirs des environs ; il remet les pièces au curé du village pour ses bonnes œuvres ...et garde le reste, soit plus de 200 livres aussi. Continuant à parler avec Katell Ruz à l'auberge du village, celle-ci lui confie (ce dont on se doutait) qu'elle travaille pour des affaires en haut lieu pour la Ligue. À tout hasard il lui propose très poliment de finir la nuit avec lui ...mais (le dé à smiley dit que) c'est non. Il n'insiste pas et il lui rend son arquebuse.

Ce qu'omet de préciser Patrice, c'est que ce cavalier Français s'est approché bien imprudemment de ce talus, derrière lequel étaient cachés 6 arquebusiers qui ne résistèrent pas au plaisir de lui adresser leurs meilleurs salutations pas du tout distinguées, qui lui furent d'ailleurs fatales  



Bon je réclame votre indulgence pour les socles des figurines que je n'ai pas pris le temps de finir et qui sont juste peints en vert  

J'ai ressorti pour l'occasion un fond de figurines que j'avais depuis plus de 20 ans dans un tiroir et qui n'avaient jamais été terminées. Je vais les reprendre pour qu'elles soient plus présentables.

Cette partie m'a donné envie - oui je suis faible - de me créer un petite troupe de ligueurs pour combattre les Français et les Anglais.

J'ai beaucoup aimé cette figurine - bien peinte par Patrice - de cavalier équipé d'une arquebuse, que j'ai choisie pour incarner mon personnage.



Je viens de la commander chez TAG avec quelques autres... Oui je m'étais promis de ne plus acheter de figurines et encore moins en Angleterre...

Bon l'aspect positif, c'est que je vais commencer à penser à peindre mes reivers parfaitement adaptés à cette période...
Oui je sais, je dois d'abord finir les Gallois et les Bretons arthuriens que j'ai ressortis du tas... Ahhh mais arrêtez de me casser le moral !

Pour mémoire, si la période vous intéresse, le livre La Ligue en Bretagne de Hervé Le Goff

Ehouarn a écrit:une petite troupe de ligueurs pour combattre les Français et les Anglais

Je ne suis pas un spécialiste de la période, mais les Ligueurs et les Royaux ne sont pas ni plus ni moins Français ou Bretons les uns que les autres ? Apparemment les sentiments sont partagés en Bretagne entre les partisans du roi Henri III, puis Henri IV plus nombreux, et les partisans de Mercœur. En Bretagne les Royaux comme les Ligueurs sont pour la plupart des locaux.

Ehouarn a écrit:cette figurine - bien peinte par Patrice

Ça existe, ça ?

Bon, puisque le tristement célèbre La Fontenelle est apparu dans cette aventure, voici pour mettre dans l'ambiance une gwerz (chant traditionnel) le concernant. Il avait épousé, sans peut-être trop lui demander son avis, la jeune héritière de Coadelan, encore très très mineure.

Paroles avec traduction en français :
https://fr.wikisource.org/wiki/Barzaz_Breiz/1846/La_Fontenelle_le_Ligueur/Bilingue

Une version chantée, avec des couplets différents mais c'est le même air ...et le même sens général :

Patrice a écrit:
Je ne suis pas un spécialiste de la période, mais les Ligueurs et les Royaux ne sont pas ni plus ni moins Français ou Bretons

Certes, certes, par Français j'entends les tenants de la royauté Française, mais tu as raison, tous les partis étaient représentés localement.

Patrice a écrit:

Ehouarn a écrit:cette figurine - bien peinte par Patrice

Ça existe, ça ?

Oui, raison pour laquelle je l'ai mentionné afin de t'encourager à continuer de t'appliquer  

Patrice a écrit: Bon, puisque le tristement célèbre La Fontenelle est apparu

Pour plus de détails sur ce sinistre personnage Guy Éder de La Fontenelle

Patrice a écrit: Une interprétation de la musique de cette chanson

Le lien ne fonctionne pas...

Ehouarn a écrit:Le lien ne fonctionne pas...

Corrigé. Je viens d'en trouver un autre, chanté, pas vraiment le même texte mais ça montre la variété dans les chants populaires (et sans doute une authenticité ancienne dans la variété).

Quelques réflexions pour s'inspirer de ce genre de scénarios sont ici en rubrique "Scénarios & concepts"
https://www.anargader.net/t3334-chal-ha-dichal-ou-scenarios-aller-et-retour

Par ailleurs, le compte-rendu en anglais est sur TWW et sur LAF ; et aussi sur FU!UK où il n'y a malheureusement plus grand'monde.
https://www.thewargameswebsite.com/forums/topic/argad-aar-not-quite-there-and-back-again/
https://leadadventureforum.com/index.php?topic=135834.msg1725904#msg1725904
http://www.frothersunite.com/phpBB3/viewtopic.php?f=10&t=115895#p1228111

Beau cr il y a des photos qui rendent vraiment bien.